#4 Outrage

lundi 30 septembre 2013 par CAJ |

L’outrage, souvent accompagné de la rébellion est une des armes de la police et aussi un moyen d’arrondir les fin de mois... Petite explication.

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Extrait de l’excellent site face à la police face à la justice.

L’outrage est défini comme étant "les paroles, gestes ou menaces, les écrits ou images de toute nature non rendus publics ou l’envoi d’objets quelconques adressées à une personne investie d’une mission de service public dans l’exercice ou à l’occasion de sa mission et de nature à porter atteinte à sa dignité ou au respect de la fonction dont elle est investie" (art 433-5 du Code Pénal).
La peine encourue est de 7500 euros d’amende.
Si cette personne "investie d’une mission de service public" est en plus "dépositaire de l’autorité publique", ce qui est le cas des flics, une peine de six mois de prison s’ajoute à l’amende.
En réunion, les peines sont aggravées et peuvent aller jusqu’à 15000 euros d’amende et un an de prison si l’outrage s’adresse à un flic ou à une autre personne "dépositaire de l’autorité publique".
L’interprétation de la notion d’outrage est très vaste : un simple regard jugé "narquois", un geste qui exprime "le dédain ou le mépris" peuvent suffire. Le délit d’outrage, quand il est adressé aux flics, a ceci de particulier qu’il est constaté par celui à qui il est adressé.
De même, la liste des personnes "investies d’une mission de service public" ou "dépositaires de l’autorité publique" est très longue : en plus des flics, on y trouve les juges, les matons, les élus, les contrôleurs, etc...

Un autre article intéressant de résistons ensemble.

L’usage que les flics font de l’outrage

Selon des statistiques citées par le journal Le Monde (21 février 2003), les condamnations pour outrages à personnes dépositaires de l’autorité publique ont progressé de 42% entre 1995 et 2001, et celles de rébellion de 27%. Cette augmentation "exponentielle", pour reprendre l’expression d’un syndicat de magistrat, s’explique par l’usage que les flics font de ces délits.
Le délit d’outrage sert d’abord à couvrir les violences policières. Lorsque les flics tapent sur quelqu’un, à l’occasion d’une arrestation ou au commissariat, ils poursuivent presque systématiquement cette personne pour "outrage", alors souvent associée à la "rébellion" et aux "violences volontaires sur personne dépositaire de l’autorité publique". C’est une manière pour eux de justifier les marques de coups visibles : puisque cette personne était violente, il a bien fallu la maîtriser, et donc faire usage de la force. Ils se dédouanent ainsi, à l’avance, de toute mise en cause de leur violence devant un tribunal.
Le délit d’outrage permet de poursuivre ceux que les flics considèrent comme des gêneurs. Cas typique : un passant qui intervient lors d’un contrôle d’identité ou une arrestation à laquelle il assiste et qu’il trouve trop musclée. Il peut facilement se retrouver inculpé d’outrage, éventuellement de rébellion voire "d’incitation à l’émeute" (voir les "précisions juridiques"). On a vu aussi des cas ou l’outrage et ses délits associés servaient à envoyer en taule, pour plusieurs mois, ceux que les flics avaient ciblés comme des meneurs dans une cité.
Le délit d’outrage permet aux flics d’arrondir leurs fins de mois. La loi Le Pors oblige l’Etat à verser à ses fonctionnaires les dommages et interêts qu’ils ont obtenus lors des procès et que les condamnés ne peuvent payer. En cas d’outrage, les flics qui se portent partie civile obtiennent souvent des sommes de plusieurs centaines d’euros qu’ils sont sûr de toucher, même si le condamné est le dernier des RMIstes. Cette fonction du délit d’outrage n’est pas à négliger, elle explique en partie l’augmentation spectaculaire de l’outrage dans les statistiques de ces dernières années.
Comment réagir quand on est accusé d’outrage ? Ces conseils ne sont pas des solutions miracles, mais doivent permettre d’éviter les pièges les plus grossiers. Ils sont valables aussi quand on est conjointement accusé de rebellions et de menaces.
Dans le cas des affaires d’outrage et de rébellion, le dossier de l’accusation se résume la plus part du temps aux déclarations des flics. En droit, un témoignage policier n’a pas plus de valeur que celui de n’importe qui. Dans les faits, la connivence entre la justice et la police est telle que le tribunal va systématiquement favoriser cette dernière . Il est donc indispensable de contester avec le plus de force possible la version des flics, et de contre-attaquer par une mobilisation et éventuellement une plainte contre les brutalités policières. L’expérience montre qu’ainsi, si on arrive rarement à la relaxe, on aboutit à des peines moins graves. Une peine légère dans ce genre de cas signifie concrètement que le juge n’a pas vraiment cru les flics : mais il va rarement jusqu’à les désavouer totalement. En revanche, toute autre stratégie de défense, et en particulier celle qui s’imagine que "faute avouée est à moitié pardonnée" conduit en général aux peines les plus lourdes.

Contester la version des flics

C’est avant tout nier l’outrage ou la rébellion, c’est donc pour celui qui est accusé nier avoir prononcé certaines paroles ou effectué certains gestes. Mais attention : nier les insultes, mais reconnaître par exemple avoir "crié" ou s’être "énervé, c’est déjà trop. Le juge s’appuiera sur ce prétexte pour condamner, avec un raisonnement du style "puisqu’il était énervé, il est fort possible qu’il se soit laisser aller aux insultes". Il faut donc savoir présenter une version vraisemblable, qui ne laisse aucune prise à une interprétation malveillante ("j’étais très calme", "je ne me suis jamais adressé directement aux policiers"...), et ne pas en varier.
Il faut savoir aussi, pour celui qui est accusé, à quel moment donner sa version des faits. En garde à vue, juste après une arrestation mouvementée, et face à ses accusateurs, ce n’est pas toujours le meilleur moment. Les flics risquent aussi de rédiger ou modifier leurs propres déclarations en fonction de ce que la personne en garde à vue aura dit, de manière à l’enfoncer d’avantage. Durant la garde à vue, il est parfaitement possible de ne pas répondre aux questions des flics et de garder le silence : c’est un droit reconnu, quoiqu’en disent les flics. En revanche, devant le procureur ou le juge, il faut parler : mais à ce moment là, par l’intermédiaire d’un avocat, on aura eu accès au dossier et on pourra connaître la version des flics, à partir de laquelle on pourra élaborer sa propre défense.
Enfin, contester la version des flics, c’est durant le procès traquer les incohérences dans leurs déclarations et faire citer des témoins qui viennent les contredire. C’est le travail de l’avocat. Même commis d’office, un avocat n’a pas à imposer sa stratégie de défense à son client, mais doit se plier à ce qu’il demande : sinon il faut en changer. C’est là qu’un comité de soutien peut intervenir.

Le comité de soutien

La mobilisation autour d’un comité de soutien (amis, famille, etc...) vise à briser l’isolement de l’accusé face à la machine judiciaire. Sur le plan pratique, le comité de soutien peut déjà, si nécessaire, servir à trouver un avocat qui accepte la stratégie choisie par le prévenu. Il va aussi s’intéresser aux témoins qui ont vu la scène. Il faut savoir que l’avocat n’est pas supposé rencontrer les témoins de la défense, encore moins aller les chercher : on pourrait le soupçonner de s’être entendu avec eux sur la version que ces témoins doivent livrer au tribunal. C’est donc au comité de soutien de faire ce travail : bien entendu le comité de soutien ne doit "trouver" que des gens qui témoignent dans le sens favorable à la défense. Le comité de soutien va aussi ramener à l’avocat les pièces nécessaires lors du procès (attestation de logement, de stages, d’études, de séjour...).
Le comité de soutien peut aussi, dans certains cas et si le prévenu est d’accord, servir à rendre l’affaire publique : présence à l’audience, tracts, presse, appui d’associations... C’est une stratégie offensive dont l’expérience montre qu’elle peut être efficace.

Porter plainte contre les flics

Il faut savoir que ces plaintes sont très longues, aboutissent rarement et la plus part du temps se perdent dans les sables. Le système est conçu pour cela. Il est illusoire d’imaginer que la justice se "rendra compte" des torts de la police et reconnaitra ses droits de "victime" à celui qui s’est fait tabasser (sauf dans de rares cas). En revanche, la plainte à l’IGS peut fournir un argument au procès pour soutenir la thèse de la défense.




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